Comment préparer et utiliser des biofertilisants de manière sûre et efficace ?

Les principes de la biofertilisation 
Agroécologie

Tavares Gilmar

Professeur titulaire de l’Université fédérale de Lavras (UFLA).

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Les principes de la biofertilisation 

Qu’est-ce qu’un biofertilisant ?

Un bio-fertilisant est un engrais organique liquide que l’on peut produire dans toutes les exploitations rurales avec des composants faciles à trouver sur place (fumier animal, résidus végétaux). Très facile et rapide à préparer, un bio-fertilisant constitue le complément idéal d’une fertilisation à base de compost.

Produit et composé à partir d’organismes vivants, c’est un engrais naturel contenant les principaux minéraux dont se nourrissent les plantes directement qui contribue donc à augmenter l’absorption de nutriments et la biomasse racinaire des plantes tout en les aidant à lutter contre les ravageurs et les maladies.

Les bio-fertilisants sont sans danger pour les humains, les animaux et l’environnement. On les définit comme : économiquement viables, écologiquement adéquats, socialement équitables, culturellement adaptés, technologiquement appropriés et scientifiquement prouvés.

Ils apparaissent donc comme un outil idéal pour les petits exploitants et/ou pour l’agriculture familiale, en particulier pour la production d’aliments de base destinés à la consommation humaine.

L’utilisation croissante d’engrais et de pesticides chimiques, motivée par la promesse d’une hausse de revenu, a causé une accumulation nocive de pesticides dans l’alimentation et la contamination de l’eau, des sols et de l’atmosphère, en empoisonnant tout le monde et surtout les agriculteurs eux-mêmes. Dans le même temps, la sélection perverse de parasites résistants et la nécessité qui en découle d’augmenter les dosages et même d’utiliser de nouveaux produits encore plus toxiques sont des réalités indéniables.

La demande croissante pour des aliments sains et non toxiques qui se manifeste actuellement et la nécessité urgente d’utiliser des intrants agricoles sans risque pour la santé humaine, animale et environnementale, exercent désormais une pression qui conduit à des changements significatifs dans le secteur.

Dans ce contexte, les bio-fertilisants et les bio-pesticides font à nouveau figure de solutions sûres pour produire des aliments sains et garantir la protection de la société et de l’environnement.

Toxicité des biofertilisants : 

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Biofertilisant prêt à être utilisé

Elle est en principe extrêmement faible, que ce soit pour les humains, les animaux et l’environnement. Il vaut mieux toutefois éviter tout contact avec la bouche, le nez, les oreilles et les yeux. Par précaution, il est recommandé, en cas de contact d’un bio-fertilisant avec la peau, de laver la zone concernée avec de l’eau pure. Il est également conseillé de tenir les enfants éloignés pendant la préparation, la manipulation, le stockage et l’utilisation des bio-fertilisants. Les adultes doivent systématiquement se laver les mains et le visage à l’eau après avoir manipulé ces produits, même en l’absence de contact apparent. Toute région du corps entrée en contact avec un tel produit doit être lavée à l’eau.

ATTENTION : il s’agit de recommandations de précaution. Rappelons que les bio-fertilisants sont en principe très faiblement toxiques.

Ce type d’engrais peut être utilisé pour beaucoup de cultures mais tout usage excessif doit être évité.

En dépit des nombreux avantages qu’ils offrent, l’utilisation excessive de bio-fertilisants peut entraîner des déséquilibres chimiques, physiques et biologiques, et rendre le sol impropre à la culture de certaines espèces, de la même façon que les engrais chimiques.

En règle générale, il convient d’utiliser les bio-fertilisants après un arrosage (irrigation ou précipitations) et aux heures les plus fraîches de la journée.

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Application manuelle du biofertilisant

La fréquence et la période d’utilisation varient en fonction des espèces. Le meilleur moyen de déterminer le moment auquel il convient d’utiliser l’engrais naturel est d’observer le développement des plantes. De manière générale, les utilisations peuvent s’effectuer de manière hebdomadaire jusqu’au deuxième d du cycle de croissance de la plante. À partir du troisième mois, l’agriculteur effectuera des applications tous les 15 jours.

Les applications foliaires ne sont pas recommandées pendant la floraison de la plante. Elles doivent donc être effectuées avant la floraison ou après la fertilisation des fleurs. Les bio-fertilisants peuvent être utilisés sur des fruits en cours de croissance. En cas de pulvérisation directement sur des légumes ou des fruits destinés à être bientôt récoltés (presque mûrs), il est conseillé d’attendre 45 jours avant de les consommer crus (consommation humaine). Passé ce délai, il est néanmoins conseillé de laver les légumes et les fruits avec une solution d’eau potable et de vinaigre (2 %) avant de les consommer. Les produits qui sont cuisinés (bouillis, rôtis ou cuits) sont plus sûrs.

Supposons que le bio-fertilisant soit obtenu uniquement à partir de produits végétaux, c’est-à-dire SANS utilisation de fumier animal*. Dans ce cas, les produits végétaux crus peuvent être consommés après un délai de sept jours et après avoir été suffisamment lavés à l’eau courante. Cependant, comme mentionné précédemment, l’idéal est d’utiliser une solution de vinaigre à 2 % pour les laver avant de les consommer.

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*Le biofertilisant SANS fumier animal est une alternative viable pour les communautés qui rejettent le biofertilisant avec fumier animal mais souhaitent pratiquer l’agroécologie pour éliminer l’utilisation de produits chimiques.

Dans le cas où les biofertilisants sont produits uniquement avec du fumier animal, les délais à respecter pour la consommation sont stricts. En cas de doute de la part de l’agriculteur, il est recommandé – pour ce qui est des légumes destinés à être consommés tout de suite – de ne pratiquer qu’une FERTI-IRRIGATION, c’est-à-dire d’appliquer le bio-fertilisant directement sur le sol, après l’avoir mélangé avec de l’eau pure (1 L de bio-fertilisant pour 0,5 à 10 L d’eau). Le bio-fertilisant appliqué directement au sol sous forme d’arrosage (ferti-irrigation ou fertigation) est également un excellent moyen de favoriser la croissance de la plante. La combinaison « PULVÉRISATION + FERTI-IRRIGATION » est possible et fortement recommandée.

Dans les pâturages : un délai de sept jours est recommandé avant de laisser le bétail brouter à nouveau sur le site d’application.

Semences : on peut aussi également les traiter avec du bio-fertilisant pur avant de les semer, en les immergeant dans une solution pure pendant 20 minutes. Les graines traitées doivent être séchées (dans un endroit ombragé et ventilé) avant d’être semées.

Enfin, il n’est pas recommandé d’appliquer la quantité totale de bio-fertilisants en une seule fois, car des pertes de nutriments peuvent se produire par érosion et lessivage.

Il est préférable d’échelonner les applications jusqu’au début de la récolte pour couvrir les besoins de la plante tout au long du cycle de croissance. Il ne faut jamais oublier que le dosage dilution est ce qui différencie le « remède » du poison.

Comment produire et utiliser des biofertilisants ?

Dilution basique de bio-fertilisants :

Ferti-irrigation : pour une utilisation directement dans le sol. Diluer 1 L de bio-fertilisant dans 0,5 à 10 L d’eau propre. Appliquer la solution diluée uniformément avec un pulvérisateur manuel jusqu’à ce que le sol soit bien mouillé mais sans provoquer d’écoulement.

Pulvérisation : en usage foliaire. Diluer 1 litre de bio-fertilisant dans 10 à 20 l d’eau propre. Pulvériser la solution diluée avec un pulvérisateur à réservoir dorsal en mouillant bien les plantes mais sans faire ruisseler.

Production de biofertilisants – Recette complète 

(Fabrication aérobique)

(Remarque : le processus anaérobique est plus efficace mais plus complexe. Sa recette sera fournie ultérieurement.)

Ingrédients de base :

  1. Fût de 200 l (réservoir, bidon, cylindre, tonneau).  Choisir un endroit frais, abrité et facilement accessible.
  2. 20 litres de fumier frais : De préférence des excréments de bovin, chèvre, lapin, cheval (mélange possible). Les fientes de poules et les déjections porcines sont à éviter (risques sanitaires). Il ne faut jamais utiliser de déjections de chien ou de chat. Par ailleurs, il faut s’assurer que les animaux n’ont pas été traités par antibiotiques pendant la semaine précédant la production de leurs excréments.
  3. Eau propre (200 L minimum). La qualité de l’eau est essentielle.
  4. 40 L de matière végétale non transformée (hachée et non pilonnée).

Vous pouvez utiliser de la matière végétale facilement accessible sur place, c’est-à-dire pas nécessairement un des éléments de la liste ci-dessous***.

En effet, on peut produire des biofertilisants avec des quantités de matière végétale variant de 0 (zéro) à 40 L, la quantité de fumier animal étant elle toujours égale à 20 L, pour préparer 200 L de solution.

Types de végétaux ou additifs végétaux recommandés :

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Biofertilisant en préparation

  • Feuilles vertes de la végétation indigène et/ou feuilles vertes de toute espèce présente dans la région (à l’exception de l’eucalyptus) ;
  • Mauvaises herbes indigènes (entières) ;
  • Vignes (y compris les branches fines) ;
  • Feuilles de bananier ;
  • Feuilles de bambou ;
  • Fruits tombés (verts, mûrs, gâtés) de toute espèce indigène de la région (ou non indigène). Les inflorescences peuvent également être ajoutées ;
  • Litière aviaire, litière de lapin d’élevage ;
  • Canne à sucre hachée (y compris les feuilles) ;
  • Plantes de manioc hachées (y compris les feuilles) ;
  • Cendres de poêle à bois (1 Kg maximum en évitant les restes de charbon de bois).

TRÈS IMPORTANT :

Si des plantes résistantes aux maladies des cultures et capables de pousser facilement même dans des sols pauvres sont présentes sur l’exploitation, il est fortement recommandé d’utiliser leurs feuilles dans le mélange et de les appliquer comme un additif végétal.

Méthode de préparation étape par étape

  1. Déposer la quantité totale de fumier frais dans le fût de 200 L ;
  2. Ajouter immédiatement les matières végétales hachées ;
  3. Remplir complètement le fût avec de l’eau propre ;
  4. Couvrir le fût (en ayant mélangé ou pas avec un bâton auparavant) et laisser fermenter ;
  5. Mélanger tous les jours jusqu’à ce que la fermentation soit complète (au bout de 30 jours environ) ;
  6. Filtrer le produit avec un tamis fin ou un tissu en coton ;
  7. Mettre en bouteille dans des bouteilles en plastique bien lavées, boucher hermétiquement et conserver dans un endroit frais, à l’abri des intempéries.

Filtrage de biofertilisants

Mise en bouteille de biofertilisants

ATTENTION : le bio-fertilisant filtré et embouteillé peut être conservé pendant un an (si la solution n’est jamais en contact avec l’air), jusqu’au moment de son utilisation sur le terrain où il sera dilué dans de l’eau propre comme expliqué précédemment.

REMARQUE : les matières solides du bio-fertilisant (ce qui est retenu dans le tamis ou le tissu après le filtrage) constituent également une excellente source de matière organique et de nutriments pour les plantes et peuvent être utilisées directement dans le sol cultivé.

Enfin :

L’utilisation continue du bio-fertilisant et de la bio-fertilisation ASSOCÉE AU COMPOST permettra à chaque communauté d’adapter sa production à ses besoins, en trouvant les composants idéaux ainsi que leurs quantités respectives.

Bio-pesticides :

Pour fabriquer un bio-fertilisant avec une fonction défensive naturelle, il suffit d’ajouter dans le fût des plantes entières (feuilles, fleurs, fruits, racines, écorces et tiges fines) qui sont reconnues pour leurs propriétés insecticides/bactéricides/fongicides/nématicides/acaricides, etc. Ces plantes sont le tournesol mexicain, les œillets d’Inde et même les feuilles de tabac.

  •  Pour les jardins, les pots de fleurs, les potagers et les jardins d’agrément, on peut préparer une solution en mélangeant 5 gousses d’ail écrasées et 5 grains de poivre dans un litre d’eau.
  • La solution doit reposer pendant 24 heures.
  • Elle est ensuite filtrée avec un tissu en coton.
  • Enfin, la solution filtrée est diluée dans 5 litres d’eau et appliquée par pulvérisation sur les plantes attaquées par les parasites. Si les parasites sont particulièrement virulents, il convient de diluer la solution dans un plus petit volume d’eau. Dans les cas extrêmes, il est possible d’appliquer la solution pure obtenue immédiatement après avoir écrasé l’ail et le poivre, ou d’augmenter la quantité d’ail et de poivre dans la solution.
  • Le produit doit être pulvérisé avec précaution afin d’éviter des projections accidentelles dans les yeux.

ATTENTION : les feuilles de tabac peuvent causer une dépendance chimique. Elles ne doivent donc être utilisées qu’occasionnellement.

Un bio-fertilisant pur peut être également utilisé pour lutter contre les fourmis et les insectes broyeurs. Pour cela, verser la solution pure sur les fourmilières ou les nids jusqu’à ce qu’ils soient complètement détrempés.

Le dialogue permanent entre les producteurs et les services de vulgarisation en zones rurales permettra de résoudre tous les doutes concernant la fabrication et l’utilisation, ainsi que toutes les questions liées.

Pour atteindre l’objectif d’une production alimentaire durable, les agriculteurs peuvent également compter sur la lutte biologique et le mouvement associatif (coopérativisme), qui seront abordés dans des publications ultérieures.

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